Les socialistes défendent le "droit à l'outrance" des humoristes.

Plusieurs responsables du Parti socialiste, à commencer par sa chef de file Martine Aubry, ont pris, mercredi 23 juin, la défense de Didier Porte et Stéphane Guillon, renvoyés de France-Inter. L'année dernière, Mme Aubry avait elle-même été la cible d'une chronique de Stéphane Guillon, qui l'avait comparée "à un pot à tabac".

Sur le même sujet La première secrétaire du PS n'en a pas moins exprimé la solidarité du parti aux deux humoristes. "Si certains de leurs propos ont pu choquer, écrit aujourd'hui la première secrétaire du PS, c'est la force et l'honneur d'une démocratie de laisser libre la parole des humoristes et leur droit à la moquerie et même à l'outrance. Le Parti socialiste exprime sa pleine solidarité aux deux chroniqueurs ainsi congédiés et, au-delà, à tous les journalistes qui font vivre le débat démocratique."

Plus tôt, le chef de file des députés socialistes, Jean-Marc Ayrault, avait jugé la position de Jean-Luc Hees "extrêmement inconfortable". "Je ne veux pas porter de jugement sur la décision précise de Jean-Luc Hees, il est dans sa responsabilité", a-t-il dit sur LCP. "Mais il y a un problème qui ne lui est pas propre, c'est à partir du moment où le président de la République nomme lui-même, (...) on lui rappellera tout le temps que c'est Sarkozy qui l'a nommé", a fait remarquer le député-maire de Nantes.

Les Jeunes Socialistes ont appelé à une manifestation bâillonnée vendredi à 10 heures devant la Maison de la radio.

CRISE DES ÉLITES

"La démocratie a besoin d'humoristes, même s'ils y vont parfois trop fort, même s'ils sont parfois acides, mêmes si c'est désagréable pour ceux qui sont l'objet de leurs sarcasmes", a fait valoir François Bayrou, président du MoDem. L'élu béarnais a estimé que l'éviction de Didier Porte et Stéphane Guillon est "une décision qui porte atteinte à la nécessaire liberté d'expression". "On voit là à quel point les médias ont besoin d'indépendance et à quel point la situation devient intenable lorsqu'ils en sont privés, car toute décision prise par des responsables nommés par le pouvoir est immédiatement soupçonnée", selon M. Bayrou. "Rien ne sera plus urgent, lorsque le moment sera venu, que de proposer le retour d'un service public indépendant dont on reconnaîtra enfin qu'il est le bien commun de tous les Français et pas seulement celui du pouvoir en place", estime le responsable centriste.

Le député Vert Noël Mamère a élargi cette éviction à une "crise morale" et "une crise des élites" : "Contrairement à ce qui est dit par certaines crapules politiques, ce n'est pas l'esprit des cités qui souffle sur l'équipe de France, c'est que le mauvais exemple vient d'en haut."

"Affaire après affaire, le poisson pourrit par la tête", a-t-il déclaré dans les couloirs de l'Assemblée, citant pêle-mêle "les OPA sur la presse", avec Le Monde et "l'éviction plutôt brutale de Stéphane Guillon et Didier Porte" de France-Inter, "l'attentat de Karachi et les rétro-commissions", et "l'affaire Bettencourt qui devient une affaire Woerth et qui peut-être va devenir une affaire Sarkozy".

Il a qualifié d'"anecdote" la suppression de la garden-party de l'Elysée du 14-Juillet, qui représente selon lui "750 000 euros" : "Encore un effort, monsieur le Président, et supprimez le bouclier fiscal, cela rapportera beaucoup plus d'argent aux Français."

© texte de http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/06/23/les-socialistes-defendent-le-droit-a-l-outrance-des-humoristes_1377755_3236.html#ens_id=1375635