33_facteur_cheval_retrophotos.ifrance.com.jpg - Vous décrivez le poète comme un être d'une stature prodigieuse, dont les pieds se trouvent sur la terre, tandis que sa tête disparaît dans les nuages.

C'est tout naturellement une image tout à fait habituelle dans le cadre des représentations conventionnelles de la petite-bourgeoisie.

C'est une illusion, qui est issue de désirs cachés et qui n'a rien à voir avec la réalité.

Le poète est en réalité toujours beaucoup plus petit et plus faible que la moyenne de la société.

C'est pourquoi il éprouve la pesanteur de l'existence terrestre beaucoup plus intensément et fortement que les autres hommes.

Chanter n'est, pour lui personnellement, qu'une façon de crier.

L'art est pour l'artiste une souffrance, par laquelle il se libère pour une nouvelle souffrance.

Il n'est pas un géant mais un oiseau plus ou moins multicolore dans la cage de son existence.

- Vous aussi ? demandai-je.

- Je suis un oiseau tout à fait impossible, dit Franz Kafka. Je suis un choucas - un "kavka". Le charbonnier de la Vieille-Ville en a un. Vous l'avez vu ?

© photo retrophotos.ifrance.com Le facteur Cheval ; texte Gustave Janouch, Conversations avec Kafka - LN Maurice Nadeau, Lettres Nouvelles, Paris 1978, p 18.